Écoute des victimes : « L’Église a une révolution copernicienne à vivre »

Beaucoup disent : « Moi, je ne connais aucun prêtre pédophile ni aucune victime » Pourtant, un jour, quelqu’un peut leur raconter ce qu’il a vécu. Et il faut alors être prêt à entendre.

Rencontre avec Véronique Garnier, coresponsable d’un service de protection des mineurs pour le diocèse d’Orléans. Elle a écrit Au troisième jour, une réflexion sur les douleurs spirituelles des victimes (Artège).

 

Il est vivant ! Trop souvent, le traumatisme des abus mure la victime dans le silence. Comment l’écoute peut-elle permettre de déceler un abus ?
Véronique Garnier Il faut savoir que les personnes victimes ne peuvent parler que quand elles sont prêtes. On ne peut donc qu’attendre ce moment. Rien ne serait plus maladroit que de “forcer” cette parole en quelque sorte. Il y a un moment où, pour différentes raisons, la personne est prête à parler. Il faut alors être là, disponible. Si par exemple, un jeune se met à parler à Taizé, pendant un temps de confession, au prêtre qui a su gagner sa confiance, ce prêtre ne doit pas le renvoyer vers
quelqu’un d’autre mais plutôt lui proposer d’en reparler juste après la confession. Car si ce jeune a choisi ce prêtre pour parler, c’est parce qu’il lui fait confiance. Il va sans doute d’abord le tester et s’il sent qu’il n’est pas réellement écouté, il n’ira pas plus loin. Quand une personne essaie de parler, c’est un instant très précieux. Si ce n’est pas perçu par son interlocuteur, et qu’elle n’est pas écoutée comme elle l’espérait, elle va se sentir une nouvelle fois abandonnée et trahie. Cet instant de la parole peut arriver au bout de très longues années de silence.

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Comment pouvons-nous chacun progresser dans cette écoute des victimes ?
VG Il y a un très gros travail à entreprendre dans l’Église à tous les niveaux pour ouvrir les cœurs des chrétiens à ce que les gens autour d’eux, parfois des proches, ont à leur dire. Beaucoup vont tomber de haut en découvrant que sous leur nez, depuis 30 ou 40 ans, il y a beaucoup de victimes qui n’avaient rien dit jusqu’ici. Soit parce qu’elles n’étaient pas prêtes, soit parce qu’elles ont essayé de parler et n’ont pas trouvé un accueil suffisant.
Je conseillerais à chacun de commencer par la lecture de De victimes à témoins, un document publié par la Ciase, en marge du rapport. Il faut le lire à son rythme : lire, pleurer, prier, et retourner à la lecture de ce manuscrit bouleversant dans lequel des personnes témoignent de ce qu’elles ont vécu. Ce n’est pas du voyeurisme. Cela permet de comprendre et de préparer son cœur à recevoir des confidences parfois inattendues.
Beaucoup disent : « Moi, je ne connais aucun prêtre pédophile ni aucune victime » Pourtant, un jour, quelqu’un peut leur raconter ce qu’il a vécu. Et il faut alors être prêt à entendre.

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Retrouver l’intégralité de cet entretien dans le magazine Il est vivant ! N°354 sur librairie-emmanuel.fr/revues

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